PROVEYSIEUX 2026 - LA COMMUNE EN 7 QUESTIONS
COMPTE-RENDU DE LA 1e SOIRÉE : PROVEYSIEUX, QUELS ENJEUX ?
Christian Balestrieri, maire de Proveysieux, accueille et remercie les participants, une cinquantaine de personnes.
Véronique Laforêts, au nom du Comité Consultatif Des Habitants, présente la démarche initiée par le CCDH dans le cadre du sa fonction de veille, de réflexion et d’analyse.
Hervé Gumuchian, professeur retraité de l’Institut de géographie alpine, retrace son parcours personnel et professionnel : il a vécu son enfance à Quaix, à une période où le village ne comptait que 300 habitants. Interne au lycée à Grenoble puis instituteur formé à l’Ecole normale de Grenoble, il est toujours resté dans la région. Son épouse, Mme Gumuchian, a été élue à Quaix ou elle a porté les projets de l’école maternelle et de l’ADMR. Ils ont aussi vécu quelques années à Proveysieux.
1. Les enjeux liés à l’appartenance à un massif de moyenne montagne
Il avance une première affirmation essentielle à ses yeux : Proveysieux est avant tout une commune du massif de la Chartreuse.
Le massif de la Chartreuse, comme les autres massifs préalpins, est situé en bordure du sillon alpin qui va de Genève à Valence. Chacun de ces massifs a créé un Parc Naturel Régional (PNR).
La Chartreuse est un petit massif qui se caractérise par de forts dénivelés. Il est traversé par un axe routier nord-sud : la route des cols. Le massif a une forte unité du point de vue climat et relief, mais il est fragmenté et formé de sous-ensembles très séparés les uns des autres (les habitants eux-mêmes vivent les communes comme éloignées) : certains sous-ensembles s’orientent plus vers l’extérieur du massif que vers l’intérieur (exemple, les balcons sud vers la cuvette Grenobloise). Ils subissent la pression urbaine de Lyon, Chambéry, Grenoble et de la vallée du Grésivaudan. Il y a pourtant une histoire commune, avec une vie économique active autour du bois, du charbon, des meules et de la pierre réfractaire, et une activité touristique importante.
La Chartreuse est porteuse d’une image forte et positive dans les représentations. Mais il y a aussi de nombreuses contraintes : les climats exacerbés (massif préalpin le plus arrosé), la pente, les dépacements difficiles, et la présence urbaine qui crée de la fragilité.
En synthèse : la Chartreuse a une image extrèmement forte et positive, mais elle se présente comme un ensemble morcellé de sous-ensembles qui ont du mal à s’articuler entre eux et dont les contreforts se déversent vers l’extérieur. Il y a une difficulté à vivre ce massif.
Pour terminer cette prmière partie, Hervé Gumuchian invite à la réflexion à travers un schéma qui présente un système territorial. Dans les années 70, on a pu croire que tout provient du local ; ce n’est pas tout à fait juste, car le local est dépendant de ce qu’il y a autour. Il faut aussi prendre en compte les représentations de chacun des acteurs, les reconnaître sans les hiérarchiser . La pratique du territoire et les représentations que nous en avons sont liées. Un exemple : des usages de mobilités différents génèrent des représentations du territoire différentes.
Enfin, les organisations politiques structurent aussi le fonctionnement d’un territoire.
2. Les enjeux liés à la présence d’un Parc Naturel Régional
Dans les années 1960, il y a eu au niveau national une volonté de regrouper des gens d’origines différentes pour inventer une structure dynamique autour de l’espace rural (la DATAR, Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale), et ainsi promouvoir à la fois son développement économique et social et la préservation de l’environnement.
Le premier PNR est créé en 1968. Le Vercors a fait partie des pionniers en 1973. Le Parc Naturel Régional de Chartreuse est créé en 1995.
Les communes adhèrent volontairement au PNR. Cette structure est un outil essentiel pour la Région qui a peu d’autres moyens d’action sur le territoire. Le président du PNR est nommé par la région.
Son but : construire des projets collectifs en utilisant des crédits européens et régionaux.
Pour une commune comme Proveysieux, il semble important d’être présent au Parc, si possible dans toutes les commissions.
La charte du PNR Chartreuse a été renouvelée en 2022, et son président est actuellement Dominique Escaron, maire du Sappey-en-Chartreuse.
3. Les nouveaux enjeux et la « Métro ».
En 2014, une loi provoque la création de 20 métropoles. Celle de Grenoble est créée en 2015.
Elle doit atteindre une population de 400 000 habitants et elle a pour cela besoin des petites communes de montagne. Celles-ci auront bien sûr un poids démographique faible par rapport à Grenoble (150 000 habitants), Saint-Martin d’Hères (39 000 habitants), Echirolles (37 000 habitants), qui sont en fait les trois plus grandes villes du département, et Fontaine qui est la 6ème commune du département…
La Métropole compte 49 communes en tout. Elle est gérée par un conseil métropolitain composé de représentants (élus municipaux) des 49 communes.
La Métro a également besoin des communes de montagne pour son image, et pour offrir aux urbains de l’espace et des lieux de loisirs.
L’essentiel des projets de la Métro est à visée urbaine.
Dans le Vercors, le PNR et les communes se sont opposés à l’extension de la Métro. Cela n’a pas eu lieu en Chartreuse, à cause de sa géographie plus tournée vers les villes, et par manque d’une personnalité d’envergure pour porter ce mouvement comme cela a été le cas dans le Vercors avec les maires d’Autrans et de Pont en Royans, qui n’étaient pourtant pas du même bord politique..
Certains villages ont subi une péri-urbanisation : à Quaix par exemple, la population a changé peu à peu avec une augmentation du niveau de vie. A l’origine composée d’agriculteurs et d’artisans, elle est dominée dans les années 60 par les classes moyennes, dans les années 80 par des classes moyennes supérieures, puis supérieures dans les années 2000. Ces populations exigent plus de services, ce qui produit une contrainte sur les budgets communaux. Cette zone urbaine incluant la plaine et ses contreforts est confrontée à un processus de ségrégation sociale et spaptiale extrèmement fort.
Il reste qu’indépendemment de l’existence d’une métropole, la pression foncière s’impose aux contreforts des massifs qui entourent le bassin grenoblois. Elle a sa dynamique propre liée à l’activité et l’urbanisation de la plaine.
Monsieur Gumuchian attire également notre attention sur le fait que, dans les relations des communes du balcon avec la Métro, il n’y pas que l’aspect résidentiel à prendre en compte. Par le passé, elles ont été les banlieues nourricières de l’agglomération.
4. La commune de Proveysieux au coeur de ces enjeux.
Qu’en est il sur le plan démographique ? On constate à Proveysieux un vieillisement moins accéléré que sur l’ensemble de la Métro. Mais demain les plus jeunes vieilliront-ils à Proveysieux et vont-ils pouvoir y rester ? Quel renouvellement ? Le regard démographique donne une vision de l’avenir.
La question du foncier et de l’habitat est une question forte, mais il y a une constante à ne pas oublier : Proveysieux est une commune de moyenne montagne , avec ses contraintes qui demeurent.
DEBAT
Fabrice Clerc remercie Hervé Gumuchian et introduit le débat en rappelant que Proveysieux est ce que nous avons en commun, et qu’il nous appartient de réfléchir ensemble à la manière d’habiter ce lieu.
Un débat s’engage sur la question de l’appartenance à la Métro :
D’anciens élus reviennent sur la création de la Métro : à ce moment, la communauté de commune « Coeur de Chartreuse » avait proposé à des villages comme Proveysieux de la rejoindre, mais le préfet y était opposé. Les balcons sud de Chartreuse sont tournés vers la ville et il est difficile d’échapper à la pression urbaine. On sent malgré tout un regret de ne pas avoir créé une communauté de commune du massif, qui aurait eu une plus grande force de résistance.
Les problèmes qui se posent dans les villages de moyenne montagne ne sont pas de même nature que ceux des villes (exemple : l’assainissement).
Est-ce qu’on peut dire que le Vercors a gagné à ne pas s’intégrer à la Métro et que la Chartreuse a perdu ?
Dans les liens au massif, le frein lié à la distance est souvent évoqué, ce qui apparait comme une différence d’avec le Vercors. La fermeture de la route du col de la Charmette veers St Laurent du Pont a été regretée. Il est rappelé que de l’autre côté du col c’est une forêt domaniale et l’Etat n’a pas voulu y apporter les investissements nécessaires au maintien de la route.
A Proveysieux, quelles activités économiques ?
Il y a naturellement de l’agriculture extensive (élevage) ou intensive sur de petites surfaces (maraîchage, petits fruits,…)
L’artisanat a disparu, comme dans les autres secteurs du massif (dans les Entremonts). Pour installer de l’artisanat ou de petites industries, il faut avoir à proposer des terrains et des logements. Nous sommes contraints par le PPRN (Plan de Prévention des Risques Naturels) et les prix de l’immobilier en hausse.
Il y a l’exploitation forestière qui est de moins en moins valorisée, et la forêt devient forêt « récréative ». A ce sujet, on peut regretter le manque de dynamisme du Parc qui semble un peu « en sommeil » (chargés de mission qui ne sont pas remplacés).
Projets culturels ? Le sentier des peintres avait été financé par l’Europe à travers le Parc.
Une question est posée : avec quels partenaires pouvons-nous penser notre territoire ? Avec les petites communes de la Métro, ou avec le Parc ?
Peut-être aussi chercher ailleurs des modèles d’initiatives intéressantes : initiatives individuelles, privées ou associatives, qui peuvent mobiliser directement des financements européens et inover sans reprendre le modèle urbain.
Pour certains, les périphéries doivent être des territoires d’inovation.
Que faire pour maintenir une diversité sociale dans la commune ?
Elle est pour le moment encore supérieure à celle de Quaix par exemple, elle dépend de notre capacité à accueillir des agriculteurs, des artisans, des artistes, des assistantes maternelles… Elle dépend donc de l’offre de logement, et du prix des logements qui a tendance à augmenter à cause de la pression urbaine. Il existe un lien direct entre les questions d’emploi et de logement. Il est rappelé que nous avons actuellement à Proveysieux une vingtaine de logements vacants et une vingtaine de résidences secondaires.
Sommes-nous face à un vieillissement de la population ? Non, il y a du renouvellement. Les effectifs de l’école sont assez stables.
Hervé Gumuchian suggère de renforcer les liens avec les communes voisines, et d’utiliser les réseaux sociaux comme réservoirs de ressources, d’idées et de projets. Un réseau des « amis de Proveysieux » ? Il souligne l’importance des dynamiques générées et portées par les acteurs locaux, dans le sens de l’innovation.
Dans sa conclusion, Fabrice rappelle que les élus métropolitains ne sont pas désignés par le suffrage universel. L’électeur métropolitain n’est donc pas amené à choisir un projet. Christian, en tant qu’élu siégeant à la métropole, témoigne cependant d’un projet qui se construit dans les différents groupes de la Métro.
La barrière à laquelle sont confrontés les habitants de la Chartreuse, poursuit Fabrice, n’est pas seulement géographique comme il l’a entendu ce soir. Elle est aussi politique. Que voulons-nous faire, quelles sont les fonctions aujourd’hui déléguées qui gagneraient à être socialisées, que l’on parle des déplacements, de l’assainissement etc…
Une invitation alternative à penser notre village…
Et 6 autres rencontres à venir pour continuer de le faire !